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anticiper transmission de patrimoine
Conseil
Mis à jour le 25/08/2025 10 min
Auteur : Béatrice Michaux - Rédactrice

Comment anticiper la transmission de son patrimoine immobilier ?

Transmettre son patrimoine en évitant les dissensions familiales et en limitant la facture fiscale. Voilà l'objectif de nombreux Français, réaliste à condition d'anticiper. Plusieurs solutions existent en fonction de votre situation. Vous détenez des biens et souhaitez organiser la transmission du patrimoine immobilier, dès à présent ? Avant de vous engager, vous devrez prendre certaines précautions, notamment pour préserver votre niveau de vie sur vos vieux jours. 

Points essentiels à retenir : 

  • La transmission de patrimoine n'est pas libre en France. Vous devez respecter les règles successorales en fonction du nombre d'héritiers.
  • Pour prévenir les conflits et régler moins de droits de succession, anticiper la transmission de son patrimoine s'avère indispensable.
  • Donation, démembrement de propriété, création de SCI, assurance-vie font partie des solutions idéales pour réussir. 

Qu'est-ce que la transmission de patrimoine ? Définition

Le patrimoine désigne l'ensemble des biens d'une personne, qu'ils soient matériels (comme des biens immobiliers) ou immatériels (comme des créances). Sa valeur totale se calcule après déduction des dettes. Au moment du décès, des règles prévoient la transmission à ses héritiers, mais laissent la possibilité d'aménager certains principes. 

A qui appartient le patrimoine d'un couple ? 

Avant de vouloir transmettre, vous devez savoir qui est propriétaire des biens d'un couple. Tout dépend de la situation matrimoniale : 

  • couple marié sans contrat de mariage : les biens acquis pendant le mariage sont communs, ceux reçus par donation ou succession restent propres. 
  • couple marié sous la séparation de biens : tous les biens restent propres en fonction des apports de chacun. Par exemple, un investissement locatif financé à 70 % / 30 % gardera cette proportion.
  • couple marié sous la communauté universelle : tous les biens sont communs, peu importe leur origine, même ceux reçus par donation ou succession.
  • partenaires de Pacs : le régime légal est la séparation de biens, mais vous pouvez opter pour un régime d'indivision des biens.
  • concubins : chacun reste seul propriétaire de ses biens. 

Quel est le mode légal de transmission par succession ? 

Pour bien comprendre l'intérêt d'anticiper sa succession, sachez que sans rien faire, les règles de transmission du patrimoine lors du décès sont les suivantes : 

  • L’ensemble de vos enfants bénéficient d’une part minimale de votre patrimoine "part réservataire" ou "réserve". La part de la réserve dépend du nombre d'héritiers directs. Par exemple, un couple avec 2 enfants doit leur laisser les 2/3 de son patrimoine, à parts égales.
  • L'autre partie, appelée "quotité disponible" peut être librement transmise à la personne de votre choix.

Il est néanmoins utile de préciser que cette réserve n’existe qu’en valeur. En d’autres termes, il est possible d’attribuer des biens immobiliers à des tiers, sous réserve que ces derniers puissent compenser financièrement les parts réservataires des enfants du défunt.

Exemple : Victor, marié, a 3 enfants et un patrimoine valorisé à 400 000 € au moment de son décès. Ses enfants héritent au minimum de 300 000 €, soit 100 000 € chacun et Victor peut disposer comme il le souhaite du dernier quart dans un testament. 

Pourquoi anticiper la transmission d'un bien immobilier ?

Diminuer les droits de succession 

Développer une stratégie de transmission de patrimoine de son vivant permet de diminuer l'impact financier et fiscal au moment de la succession. 

Le notaire évalue l'actif net successoral : la patrimoine net (moins les dettes) réparti par héritier, après éventuelles donations. Il applique les abattements éventuels, s'ils n'ont pas été utilisés depuis 15 ans. 

Ensuite, les droits de succession correspondent à un barème progressif par tranche, en fonction du lien de parenté : 

  • 5% si la part taxable est inférieure à 8 072 € ;
  • 10 % si elle est comprise entre 8 073 et 12 109 € ;
  • 15 % si elle est comprise entre 12 110 et 15 932 € ;
  • 20 % si elle est comprise entre 15 933 et 552 324 € ;
  • 30 % si elle est comprise entre 552 325 et 902 838 € ;
  • 40 % si elle est comprise entre 902 839 et 1 805 677€ ;
  • 45 % si elle est supérieure à 1 805 678 €.

Exemple : Émilie et Quentin héritent de la maison secondaire au décès de leurs parents, évaluée à 300 000 €. Ces derniers avaient donné à chacun 50 000 € il y a 10 ans lors de l'achat de leur résidence principale. L'actif net taxable est de 100 000 € chacun. Émilie et Victor devront s'acquitter chacun de près de 20 000 € pour conserver la maison familiale. 

Profiter d'une exonération de droits de succession

Il existe des exonérations totales ou partielles de droits de succession, notamment : 

  • exonération totale pour le conjoint marié et partenaire de Pacs ;
  • exonération totale en cas de décès d'un militaire, d'un pompier, d'un policier, d'un gendarme lors d'opérations ainsi que pour les victimes d'actes de terrorisme ;
  • exonération en cas de réversion de rente viagère en ligne directe. 

Jusqu'au 31 décembre 2026, les dons de sommes d'argent à un enfant, un petit-enfant, un arrière-petit-enfant ou, à défaut, à un neveu ou une nièce, sont exonérés de droits de mutation à titre gratuit dans la limite de 100 000 € par donateur et 300 000 € par donataire. Cette donation doit permettre d'acquérir dans les 6 mois une résidence principale ou d'effectuer des travaux de rénovation énergétique. Le donataire doit s'engager à conserver le bien 5 ans. 

Éviter les conflits d'héritage avec une donation partage

Reprenons notre exemple. Imaginons que Quentin ne dispose pas de 20 000 € et ne souhaite pas garder la maison tandis qu'Émilie souhaite conserver cette maison familiale. Lorsque les parents ne prévoient pas de leur vivant le sort de certains biens, des conflits peuvent surgir entre héritiers

Le risque est encore plus élevé en cas de familles recomposées, lorsque le conjoint survivant ou ses enfants se retrouvent héritiers avec les enfants d'une précédente union. 

Pour éviter les conflits, il est préférable de prévoir sa succession et le partage de ses biens. En outre, si vous donnez 50 000 € à chacun de vos enfants : l'un achète un bien immobilier qui prend de la valeur, l'autre le dépense pour se faire plaisir. Avec une donation simple, au jour de la succession, le bien immobilier est réévalué, pas avec une donation partage ! 

Comment transmettre son patrimoine  ? 

Donation simple ou donation partage, de son vivant

Donner ses biens de son vivant est possible auprès de ses héritiers ou même de tiers (sur la quotité disponible). 

Quelle différence entre donation simple et donation partage ? 

Contrairement à la donation simple, la donation-partage permet de figer la valeur des biens immobiliers au jour de la donation et non au jour de la succession. Ceci a le mérite d’éviter les contestations au moment du décès !

La donation partage ne peut s'effectuer qu'au profit d'héritiers, contrairement à la donation simple. Elle vient en avance de l'héritage. 

Attention, vous devez attribuer des biens immobiliers à tous vos enfants, le partage doit être équilibré entre vos enfants. A défaut des contestations éventuelles pourront survenir après le décès du donateur.

Exemple : Gustave a 3 enfants et ne peut donner en indivision un appartement à seulement 2 d'entre eux et une somme d'argent au 3e. La donation-partage pourrait être contestée ultérieurement.

Pourquoi et comment faire une donation : éviter les droits de succession 

La donation permet de bénéficier de l'abattement renouvelable tous les 15 ans. Cet abattement est de 100 000 € par parent au profit de chaque enfant et de 31 865 € par grand-parent au profit de chaque petit-enfant. 

En complément, une donation en numéraire (argent en espèces, virement, chèque) peut se réaliser sans droit au profit de ses enfants, petits-enfants, arrière-petits-enfants dans la limite de 31 865 euros, tous les 15 ans.

Le donataire peut prendre les frais de donation, notamment les émoluments du notaire, à sa charge sans que cela soit considéré comme une donation supplémentaire…et fiscalisée !

Bon à savoir :

Le présent d'usage ne nécessite aucune formalité dès lors qu'il correspond à un événement (diplôme, mariage, anniversaire, fête) et est cohérent avec le patrimoine du donateur.

Anticiper sa succession par un testament

Chacun dispose librement de la quotité disponible de son patrimoine. Vous pouvez donc rédiger un testament olographe ou authentique pour disposer de vos biens. 

Vous pouvez également rédiger un testament partage pour organiser la répartition de votre patrimoine à l'avance. Dans un couple, chacun doit faire son propre testament partage. 

Si le testament peut organiser la répartition des biens, cela ne peut se faire au détriment de vos héritiers légaux et donc déséquilibrer la réserve héréditaire. 

Utiliser le démembrement de propriété avec ses enfants

Si vous possédez un patrimoine locatif, le démembrement de propriété est une solution qui offre plusieurs atouts.

Dans un premier temps, vous transmettez sans vous appauvrir puisque vous ne donnez que la nue-propriété et conservez l’usufruit de vos biens : vous continuez à percevoir vos loyers si le bien est loué et la possibilité d'y habiter. 

De plus, les droits de donation ne sont pas calculés sur la valeur globale du bien mais seulement sur la valeur de la nue-propriété, déterminée en fonction d’un barème spécifique, en fonction de votre âge au moment de la donation.

Enfin, vous limitez les droits à payer par vos héritiers puisque l'usufruit s'éteint automatiquement lors du décès. Les nus-propriétaires retrouveront la pleine propriété le jour de votre décès, sans frais supplémentaires.

Exemple : Auguste et Madeleine possèdent un patrimoine immobilier d'une valeur de 800 000 €, à céder à leurs 2 enfants. Pendant leur cinquantaine, ils décident d'effectuer une donation en nue-propriété des biens. La valeur de la nue-propriété est de 50 % du bien, soit 400 000 €. Chaque parent donne 100 000 € à chaque enfant, soit 400 000 € en tout grâce à l'abattement

Le bien d'une valeur de 800 000 € est transmis sans frais de donation. Attention, il n'est pas transmis gratuitement car il existe des frais de notaire et de publicité foncière, estimés dans notre exemple à 15 000 € environ. 

Créer une SCI familiale

Créer une SCI à laquelle vous apportez vos immeubles (résidence secondaire, investissement locatif, etc.) vous permet de transmettre votre patrimoine en douceur. Attention, vous devez vous acquitter de droits d'enregistrement (5% si la SCI est à l'impôt sur les sociétés), les frais de notaire et une éventuelle imposition de la plus-value immobilière. 

Autre inconvénient : contrairement à une donation, l'apport à une SCI ouvre un droit de préemption de la commune ! 

En effet, le capital d’une société civile immobilière se divise en parts sociales que vous pourrez transmettre progressivement (grâce aux abattements fiscaux) en pleine propriété ou en démembrement.

De plus, vous pouvez conserver la gestion des biens en prévoyant dans les statuts que vous détiendrez l’ensemble des pouvoirs de gestion. Rien ne vous empêche, non plus, de prévoir que le gérant ne pourra être révoqué qu’à l’unanimité !

Revers de la médaille, la création d’une SCI a un coût (entre 2000 et 3000 € environ) et sa gestion impose un minimum de formalisme (convocation d’une assemblée générale annuelle, tenue d’une comptabilité, etc.).

Quelle stratégie de transmission de patrimoine en fonction de votre situation ?

L'intérêt de s'intéresser tôt à la transmission de son patrimoine est de combiner les différents moyens détaillés ci-dessus. Donation de nue-propriété d'un bien immobilier ou donation de nue-propriété de parts sociales de SCI. 

Ceci demande une évaluation de la meilleure solution en fonction de votre situation personnelle et patrimoniale. Par exemple, en présence d'un seul héritier, vous éliminez le risque de conflit. 

Certaines points spécifiques méritent votre attention :

  • la situation du conjoint survivant en fonction de la compositions de la famille et du régime matrimonial ;
  • la possibilité de transmettre des biens à des tiers, sans risque de recours de vos héritiers ;
  • la transmission du patrimoine professionnel qui obéit à des règles propres. 

Tournez-vous vers votre notaire. Au sein de votre banque, vous pouvez consulter un conseiller en gestion de patrimoine. Ils pourront vous apporter les explications nécessaires notamment sur l'intérêt de l'assurance-vie dans une optique de transmission de votre épargne. 

Questions fréquentes sur la transmission de patrimoine immobilier

Comment transmettre son patrimoine sans frais de succession ?

Vous pouvez transmettre votre patrimoine de votre vivant, grâce à une donation, en bénéficiant d'un abattement de 100 000 € par parent au profit de chaque enfant. Cet abattement se renouvelle tous les 15 ans. Vous pouvez effectuer une donation de la seule nue-propriété pour conserver l'usufruit, qui s'éteint automatiquement lors du décès. En fonction de votre âge, la valeur de la nue-propriété est bien moindre. Par exemple, entre 51 et 60 ans, elle est de 50 % de la valeur en pleine propriété. 

A quoi sert une SCI pour la transmission ?

Gérer son patrimoine via une SCI permet de céder des parts sociales et non des biens immobiliers. En complément, les parents peuvent rester gérants et prendre toutes les décisions. Cela facilite les donations successives tous les 15 ans pour bénéficier des abattements fiscaux. 

    béatrice michaux rédactrice
    Béatrice Michaux - Rédactrice

    Béatrice Michaux est diplômée d'un Master II en droit de la Propriété Intellectuelle & d'un Master I en Droit des affaires et fiscalité des entreprises de l'université Panthéon-Assas. Elle rédige des articles juridiques dans le secteur immobilier depuis 2017. 

    Karine Dabot
    Karine Dabot - Avocate associée

    Cet article a été relu par Karine Dabot, avocate depuis 1994 au barreau d'Aix-en-Provence.

    Spécialisée en droit bancaire, voies d'exécution et droit des sûretés, elle intervient principalement en contentieux civil et commercial, transactions immobilières et saisie immobilière.